Vous avez déjà remarqué des chiffres et des lettres étranges sur une partition ou dans un programme de concert et vous avez du mal à vous repérer dans tout cela ? Qu’est-ce que ces dénominations signifient ? À quoi servent-elles ? Nous vous expliquons ici comment les œuvres des compositeurs sont nommées, organisées et archivées !
Au commencement était l’opus …
Le mot qui revient le plus fréquemment est « opus ». Il signifie en latin « œuvre, ouvrage » En français, ce termes s’emploie en architecture et en musique.
Petite parenthèse architecturale :
Dans le premier cas, opus est suivi d’un adjectif latin qui précise soit l’origine géographique de l’ouvrage en question, soit le type de maçonnerie utilisée. On trouve ainsi, dans Le Côté de Guermantes, de Proust, la phrase suivante :
« Le véritable opus francigenum, ce ne sont pas tant les anges de pierre de Saint-André-des-Champs que les petits Français, nobles, bourgeois ou paysans, au visage sculpté avec cette délicatesse et cette franchise restées aussi traditionnelles qu’au porche fameux mais encore créatrices ».
En musique Opus, le plus souvent abrégé en op., sert à désigner une pièce selon la place qu’elle occupe dans l’ensemble des œuvres imprimées d’un compositeur ; ainsi la Sonate pour piano opus 57 de Beethoven est appelée « Appassionata ». Un numéro d’opus permet donc d’identifier la plupart des œuvres de musique classique. Les numéros sont en général attribués chronologiquement, par date de composition ou de publication. Ainsi, l’opus 3 a été écrit plus tôt dans la vie du compositeur que l’opus 133 ! Pratique pour se repérer, non ?
Il y a toutefois, ce ne serait pas drôle sinon, des petites variantes à connaître :
- L’abréviation op. posth. peut être utilisée lorsqu’il s’agit d’œuvres posthumes, c’est-à-dire d’œuvres publiées ou découvertes après la mort de l’auteur.
- L’abréviation allemande WoO — Werk ohne Opuszahl (« œuvre sans numéro d’opus ») désigne les œuvres auxquelles aucun numéro n’est attribué. L’appellation en latin est : op. deest (l’opus fait défaut).
Nota Bene : les règles typographiques imposent que les titres et numéros d’opus soient toujours en italique.
Un exemple pour apprendre à décrypter !
Prenons cet exemple. Cette couverture nous indique :
- Le compositeur : Beethoven
- Le genre de l’œuvre : une sonate
- Les instruments nécessaires pour jouer la pièce : violoncelle et pian
- Le numéro d’opus : opus 5
Comme il y a plusieurs pièces dans ce même opus, il y a une sous-catégorie appelée « numéro » : ici le 2ème de l’opus en question
- La tonalité : g-moll ce qui signifie : sol mineur
Pour lire la partition en entier : cliquez ici
Un peu d’histoire…
Il semble que l’emploi d’un numéro d’opus apparaisse à la fin de la Renaissance. L’usage se développe au XVIIe siècle mais c’est à compter du XVIIIe siècle qu’il se généralise, en raison du développement de l’édition et de la naissance du droit d’auteur. Ce siècle est un siècle de rationalisation… les partitions ne font pas exception à la règle !
À l’époque romantique, son emploi est courant. De nos jours, les compositeurs semblent préférer des titres plus évocateurs… Pour le constater, vous pouvez notamment vous promener dans la base de données Brahms de l’IRCAM qui répertorie des œuvres contemporaines :
https://brahms.ircam.fr/fr/Au-delà de son aspect pratique, le numéro d’opus peut aussi revêtir une dimension symbolique. Robert Schumann, notamment, avait conservé en réserve le numéro d’opus 6 pour ses Davidsbündlertänze, composées et publiées après Carnaval op. 9 et la Sonate pour piano no 1 op. 11, le cycle citant une mazurka provenant des Soirées musicales op. 6 de Clara Wieck.
Les exceptions mais aussi les cas de Bach, Mozart, Chopin…
Dans certains cas, les dates de composition ou de publication ne sont pas connues de manière précise, comme pour un grand nombre de compositeurs de la période baroque, mais aussi pour les premières compositions de Mozart. Dans ce cas, on utilise généralement la numérotation d’un catalogue thématique établi par un spécialiste faisant autorité.
Par exemple :
- Le Bach Werke Verzeichnis (« catalogue des œuvres de Bach »), désigné couramment par le sigle « BWV », est le catalogue thématique des œuvres de Jean-Sébastien Bach établi dans les années 1950 par Wolfgang Schmieder.
- Les œuvres de Mozart sont répertoriées selon la numérotation « KV » pour Köchel Verzeichnis ou « catalogue Köchel » ou « K », du nom de Ludwig von Köchel, auteur, en 1862 de la Chronologisch-thematisches Verzeichnis sämtlicher Tonwerke Wolfgang Amadé Mozarts (« liste exhaustive chronologique et thématique des œuvres musicales de Wolfgang Amadeus Mozart »).
Ce catalogue connaît plusieurs révisions jusqu’à nos jours, intégrant de nouvelles œuvres ou rejetant des œuvres réattribuées à d’autres compositeurs, tout cela est finalement mouvant !
Quant aux quelques œuvres de Frédéric Chopin sans numéro d’opus, elles sont répertoriées d’après le Kobylanska Katalog (« KK »), du nom de Krystyna Kobylańska, auteur en 1979 de la Thematisch-bibliographisches Werkverzeichnis (« liste thématique et bibliographique des œuvres de Chopin »).
Catalogue Köchel : Source Wikipédia
Les principaux catalogues par compositeur
Source : Wikipédia
Amusez-vous à parcourir ces grandes œuvres… Vous constaterez que les opus et autres dénominations sont de bons moyens pour se repérer chronologiquement et se souvenir des œuvres que vous avez écoutées ou jouées !
Éditrice : Calamus Conseil